COURRIER PICARD DU 30 MARS 2001


Amiante: le pire est à venir

Le nombre de cancers liés à l'amiante est deux fois plus élevé que prévu, avec au moins 3.500 nouveaux cas en 1998, mais le pire est encore à venir, selon une enquête publiée hier dans l'hebdomadaire Le Point.

Ce résultat, qui a le mérite de rappeler que l'amiante tue et tuera encore, sera présenté vendredi dans le cadre des journées "Envois 2001 " à Nancy.

En 1996, un rapport d'experts, réunis par l'INSERM sous la présidence d'André Bernard Tonnel, a dressé un constat accablant sur les effets de ce matériau isolant et anti-incendie, qui provoque des cancers des poumons et de la plèvre (mésothéliome). Il estimait à "au moins 2.000" le nombre annuel de morts par amiante, cette année-là. Mais le pire est à venir "nous estimons qu'entre 50.000 et 100.000 personnes décéderont dans les vingt prochaines années de pathologie liées à l'inhalation de fibres d'amiante", a confirmé à l'A.F.P. le professeur Marcel Golberg, épidémiologiste, spécialiste de l'amiante. La carte de France des cancers illustre la réalité de la mort par amiante avec des départements particulièrement touchés comme le Nord, la Seine-maritime, où d'autres qui les talonnent dans ce palmarès noir, comme l'Isère, les Bouches-du-Rhône, le Var, les Alpes-Maritimes, la Moselle, l'Aisne, le Calvados la Gironde la Somme et l'Oise.

"Le nombre des victimes est bien plus élevé que ne le laissaient penser les différentes estimations avancées

jusqu'à ce jour par les épidémiologistes français", note François Malle, auteur de l'enquête effectuée à l'aide de statistiques extraites de bases de données hospitalières jusque là non exploitées.

"La différence est très importante. Pour l'année 1998, Nous avons de l'ordre de 800 mésothéliomes (cancers de la plèvre) et l'hebdomadaire en trouve 1.300.

Mais nous croisons nos résultats avec les données nationales de mortalité, relève le Pr Golberg.

Risques professionnels

"On va confronter les données et retourner aux dossiers des patients, dit-il. 11 évoque des divergences de définition des cas (année d'hospitalisation ou année du diagnostic). Mais, ajoute-t-il, "cette démarche est très intéressante".

"D'une façon générale, les médecins ne sont pas attentifs aux risques professionnels, la profession n'est souvent même pas notée dans le dossier", déplore-t-il.

La demi-douzaine de cas touchant des sujets jeunes, notamment une comptable de l'usine de Fibrociment Éternité (Nord), emportée par un cancer de la plèvre à 27 ans, soulève l'inquiétude si la sécurité des chantiers de décontamination des immeubles pleins d'amiante laissait à désirer.

"L'âge moyen de survenue des cas (mésothéliome) se situe entre 60 et 70 ans, correspondant à une exposition qui a commencée au début de la carrière professionnelle, vers l'âge de vingt ans", explique le Pr Golberg.


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